Ce roman, considéré comme le chef-d’œuvre de Malaquais, est une grande fresque historique où le lyrisme visionnaire se mêle au plus sombre réalisme. Le roman évoque Marseille en 1942, alors que la ville se situe dans la zone non occupée («nono») par l’armée allemande.
Une temporalité romancée
Dans Planète sans visa, Malaquais choisit de ne pas respecter la chronologie réelle des épisodes qu’il raconte. L’auteur utilise une temporalité condensée pour dramatiser les événements. Voici une comparaison entre la chronologié réelle des événements et la chronologie retenue dans le roman :
La chronologie réelle :
• Pétain visite Marseille le 3 décembre 1940
• Les rafles de Juifs se précipitent à l’été 1941. La plus grande a lieu en août 1942.
• La Wehrmacht entre à Marseille le 11 novembre 1942
La chronologie du roman :
• La rafle des Juifs, préparatoire à la visite de Pétain, a lieu en 1942.
• Pétain visite Marseille en 1942
• La Wehrmacht entre à Marseille le 11 novembre 1942
De vieilles connaissance
Dans Planète sans visa, Malaquais évoque les conditions de vie pendant la guerre et nous présente deux vieilles connaissances : la dèche et la faim.
«Dans la rue Lévis où naguère des volailles plumées et des viandes saignantes et des fromages opulents débordaient en cascade sur le trottoir et se mêlaient aux fruits étagés en pyramide dans les voiturettes des maraîchers, quelqu’un offrait des brocolis, quelqu’un des rutabagas, et un ménage d’aveugles une sébile.»
Planète sans visa, Paris, Phébus, 1999, p. 313.
Les personnages
Malaquais donne vie à tous les personnages de Planète sans visa. Il nous fait connaître leurs pensées sans les juger, quelle que soit leur orientation idéologique.
Planète sans visa témoigne de l’expérience incroyable d’une coopérative ouvrière, le Croquefruit (Sucror), fondé par l’acteur trotskiste Sylvain Itkine. Dans ce refuge précaire, les humanistes malaxent et militent. Ce roman est un des seuls à mettre en scène des militants internationalistes au cœur de la Deuxième Guerre Mondiale.
Le roman présente également le haut fonctionnaire Aldous John Smith qui permet aux humanistes de fuir l'Europe. Ce personnage représente le bien réel Varian Fy et Malaquais en a fait un personnage essentiel de Planète sans visa et l’objet de plusieurs essais. Fry lui envoya son livre de mémoires Surrender on Demand (La liste noire) avec la dédicace suivante : «To the one who has not forgotten».
Marseille 1942 au présent
«Ce roman avait cinquante ans d’avance : il est temps de le lire.» (Norman Mailer). À Lille, en 2004, Dominique Sarrazin a adapté pour le théâtre Planète sans visa.